Paris, 21 juillet 2014
La Ligue des droits de l’Homme réaffirme son rejet absolu de toute
forme de racisme et d’antisémitisme. Elle appelle tous ceux et toutes
celles qui sont attachés à ces principes fondateurs de la République à
ne rien tolérer en ce domaine. Elle exprime en même temps son
attachement déterminé à la liberté d’expression et de manifestation. Il
revient aux pouvoirs publics de faire respecter le droit de chacun à
exprimer ses opinions pacifiquement, et dans le cadre des lois de la
République. La paix civile, comme le libre débat démocratique, ne seront
préservés que si les pouvoirs publics ont une attitude claire et
impartiale.
Les actes antisémites commis à Sarcelles autour d’une manifestation
interdite ne servent en rien la cause palestinienne et sont, en tout
état de cause, inexcusables ; ils appellent enquêtes et sanctions. Rien,
en revanche, ne justifie qu’ils puissent servir à l’interdiction de « toutes les manifestations présentant un risque »
comme des voix, déjà, le réclament… Sous couvert de ne pas attiser un
affrontement communautaire, le gouvernement est en train d’en créer
toutes les conditions, en faisant vivre un « deux poids, deux mesures »
injustifié et dangereux.
Cette dynamique perverse est le fruit de trois contre-vérités alimentées par la parole gouvernementale :
- il n’est pas vrai que celles et ceux qui entendent manifester leur douleur, leur inquiétude et leur solidarité se « laisseraient entraîner par des querelles qui sont trop loin d’ici pour être importées ». D’abord parce que ramener l’offensive sur Gaza à une « querelle »,
c’est déjà et presque prendre le parti de l’agresseur, en évacuant sa
dimension aussi illégale que tragique. Ensuite parce que la solidarité,
l’humanité et les droits de l’Homme ne sont pas une affaire de
kilométrage, et que prétendre l’ignorer revient à dire aux Françaises et
Français à quoi ils devraient être sensibles et à quoi ils ne le
devraient pas ;
- il n’est pas vrai que critiquer Israël et son offensive miliaire
contre la population de Gaza soit manifester quelque antisémitisme que
ce soit. Il est donc honteux que le Premier ministre ait instrumentalisé
la commémoration du 72e anniversaire de la rafle du Vel d’Hiv pour stigmatiser, en les qualifiant de « nouvel antisémitisme »,
celles et ceux qui exigent que cesse le massacre à Gaza. Les
responsabilités d’un Etat ne sont en aucune façon celles de personnes ou
de communautés ; cela vaut aussi pour l’Etat d’Israël ;
- il n’est pas vrai, enfin, que les débordements et incidents
survenus à Paris autour de la manifestation de solidarité avec la
population de Gaza justifient a posteriori son interdiction. Le
prétendre, c’est délibérément confondre la cause et les conséquences. La
décision d’interdire, prise au plus haut degré de l’Etat a, au
contraire, enclenché une dynamique de colère, avivée un sentiment
d’injustice flagrante et fait le jeu de toutes les provocations. La
preuve c’est que partout où elles ont été autorisées, en France comme
ailleurs, ces manifestations se sont déroulées de façon pacifique.
Au moment où tout indique que le gouvernement israélien entend
poursuivre son offensive militaire sans tenir aucunement compte des lois
et conventions internationales protégeant les vies civiles, il est plus
que légitime de soutenir les actions pour un cessez-le-feu et pour la
paix. C’est pourquoi la Ligue des droits de l’Homme appelle à manifester
pacifiquement le mercredi 23 juillet, à Paris, à partir de 18h30, de
Denfert-Rochereau aux Invalides.