dimanche 28 décembre 2014

[Communiqué commun] Réaction à l'expulsion du territoire français d'une femme nigériane.

A Rennes, le 23 décembre 2014

Madame, Monsieur,
Elle s'appelle Reine. C'est une femme nigériane âgée de 24 ans, arrivée en France le 8 février 2010. Après bientôt 5 ans de présence en France, elle s'est fait arrêter à Tours, lors d'un banal contrôle en bus, pour défaut de titre de transport.
Elle est placée en rétention au local de rétention de Tours, le 16/11/14, puis transférée à Rennes. Elle se retrouve, le 17 novembre 2014, enfermée au CRA de Rennes-Saint-Jacques.
Après 4 jours d'enfermement, elle a des douleurs au ventre et souffre de saignements. Elle est hospitalisée quelques heures, puis ramenée au CRA. Le médecin estime que "son état n'est pas incompatible avec la rétention". Pourtant Reine ne va pas bien et présente quelques troubles. La Cimade demande à ce qu'elle voit un psychiatre, mais elle n'aura droit qu'à un entretien avec l'infirmière du centre.
Reine reçoit le soutien régulier de F., une visiteuse, qui lui apporte un peu de réconfort et de nourriture car elle ne peut plus ingérer les repas du centre, notamment le soir. Au 25e jour de rétention, alors qu'elle doit être présentée pour la seconde fois devant le JLD, Reine est réveillée brutalement, à 4h du matin, pour être conduite à l'aéroport. Face à ses cris en montant dans l'avion, l'escorte décide de la ramener à Rennes pour la présenter au juge. Malgré le désespoir de la jeune femme, le JLD prononce une nouvelle prolongation de 20 jours.
De retour au CRA, Reine se retrouve seule face à ses angoisses.
Selon le témoignage de la visiteuse, samedi 20 décembre, "vers 4h, sans avoir été invitée àse préparer a minima, Reine a été entravée, pieds et mains, et n'a pu s'opposer à son départ...Elle se retrouve au Nigéria, pays dangereux, seule, sans argent, ne sachant pas où est sa famille ..."
Comment peut-on , en notre nom à tous, infliger de tels traitements à un être humain, et qui plus est, à une femme en danger à son retour au Nigéria compte tenu de son histoire antérieure ?
Comme de nombreuses femmes nigérianes, Reine fuyait un réseau d'esclavagisme moderne qui l'obligeait à se prostituer pour rembourser le passeur. Malgré ses craintes de représailles, elle avait fini par se résoudre à dénoncer ses proxénètes en espérant obtenir la protection de la France...
Il faut rappeler qu'en avril 2013, Reine avait envoyé une plainte écrite au procureur de la République de Tours pour dénoncer le réseau organisé de proxénétisme (dont l'activité s'apparente à une traite des êtres humains) qui avait organisé sa venue en France et l'avait soumise à la prostitution à Bordeaux, plainte classée sans suite par le Procureur de Tours...
Au CRA de Rennes St-Jacques, Reine avait souhaité être entendue par les services de police pour, à nouveau, dénoncer le réseau de proxénétisme, demande non suivie d'effets !
Si la plainte avait été classée sans suite en 2013, c'est que Reine n'avait pu donner alors plus d'éléments suffisants aux forces de police par peur des représailles. Par la suite, elle s'est finalement résolue à aller plus loin dans la dénonciation du réseau dont elle était victime, lorsqu'elle a été enfermée au centre de rétention. Rien que pour cette raison, elle aurait dû bénéficier du dispositif prévu dans la loi (CESEDA article L316-1 et R316-1) qui lui aurait permis d'être mise à l'abri durant 30 jours, afin de poursuivre sa démarche dans les meilleures conditions possibles.
Au lieu de cette protection que la France lui devait, les autorités françaises ont décidé de l'expulser ! Un plan d'action national contre la traite des êtres humains a pourtant été adopté en mai 2014 et cette lutte est une politique publique à part entière...
Nous tenions à vous informer que nous sommes profondément révoltés par cette expulsion que nous trouvons ignoble et cette politique inhumaine rendue en notre nom et financée par nos impôts. Nous continuerons de lutter contre cette politique migratoire basée sur la suspicion et l'obsession sécuritaire au mépris des valeurs humaines qui nous animent.

Signataires : MRAP 35 ; RESF 35 ; CCFD -Terre solidaire 35 ; La Cimade Rennes / Hendaye ; La Vie Nouvelle 35 ; Ensemble ! 35 ; Bienvenue 35 ! ; Cercle de silence 35 ; Un toit, c'est un droit ; LDH Rennes/ Redon / Paris ; Parti de Gauche 35.

samedi 20 décembre 2014

Rwanda: La FIDH et la LDH publient un rapport d’analyse sur le procès de Pascal Simbikangwa

FIDH - Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme
et son organisation membre en France
LDH - Ligue des droits de l'Homme

Rwanda: La FIDH et la LDH publient un rapport d’analyse sur le procès de Pascal Simbikangwa




Paris, 19 décembre 2014 – La FIDH et la LDH publient aujourd'hui un rapport d’analyse sur le procès emblématique de Pascal Simbikangwa, premier accusé de participation au génocide des Tutsis au Rwanda à avoir été condamné en France. Le procès s’est  déroulé du 4 février au 14 mars                2014 devant la Cour d’assises de Paris. Pascal Simbikangwa ayant fait appel de sa condamnation, le procès en appel est prévu courant 2015.

« A travers la tenue de ce procès, la justice française a démontré que, grâce à la compétence extraterritoriale, la France pouvait juger des accusés de graves crimes internationaux, même lorsqu’il s’agit de crimes commis il y a 20 ans et à des milliers de kilomètres » a déclaré Patrick Baudouin, avocat et président d’honneur de la FIDH.

Ce procès est le premier organisé en France concernant les faits de génocide des Tutsis au Rwanda. Il est également le premier, fondé sur la compétence extraterritoriale des juridictions françaises, à s’être déroulé en présence de l'accusé. Les précédentes décisions rendues sur ce fondement, qui concernaient des actes de torture perpétrés en Mauritanie et en Tunisie, l’avaient été par défaut, les accusés étant en fuite au moment des procès. Il s’agit également de la première affaire renvoyée devant la Cour d'assises par le Pôle spécialisé dans les enquêtes et poursuites en matière de génocide, crime contre l'humanité, crime de guerre et torture, créé en janvier 2012 au sein du Tribunal de grande instance de Paris.

Ce rapport revient sur les grandes étapes de la procédure judiciaire qui a mené au procès de Pascal Simbikangwa, et présente les principaux enseignements des six semaines d’audience organisées devant la Cour d’assises de Paris. 

« Le premier test grandeur nature de la capacité du pôle spécialisé mis en place par la France pour poursuivre les auteurs des crimes les plus graves s'est déroulé de manière satisfaisante » a ajouté Michel Tubiana, avocat et président d’honneur de la LDH.

Ce procès, dont l'appel est attendu au courant de l'année 2015, est le premier d'une série d'autres procès concernant des actes commis pendant le génocide des Tutsis au Rwanda. La FIDH et la LDH se sont constituées partie civile dans la plupart de ces affaires.

Télécharger le rapport Procès de Pascal Simbikangwa : retour sur un procès emblématique

jeudi 18 décembre 2014

Le 18 décembre, Reconnaître enfin les droits universels et indivisibles des migrants

Chaque année, à l’occasion de la journée internationale des migrants célébrée le 18 décembre, l’AEDH joint sa voix à celles des organisations de la société civile européenne pour demander à l’UE et à ses États membres de signer et ratifier la convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 1990.
Notre association regrette de devoir réitérer cet appel, en cette année 2014 marquée par l’adoption finale du « paquet » européen concernant l’immigration de travail. Ces directives témoignent de ce que l’UE s’obstine à ne considérer les migrants qui viennent travailler et vivre dans nos pays qu’à l’aune de leur contribution à la création de richesses dans nos nations. Elle s’avère incapable de respecter les conventions internationales dont les États membres sont pourtant parties, voire ses propres règles, notamment l’article 20 de la Charte des droits fondamentaux qui stipule que « toutes les personnes sont égales en droit ».
La convention onusienne n’édicte pourtant aucun « nouveau » droit ; elle ne prend pas parti dans le débat sur les politiques d’immigration et les législations nationales ; elle se limite à rassembler les droits civils et politiques, d’une part, économiques, sociaux et culturels, d’autre part, déjà présents dans les pactes internationaux ratifiés par la plupart de nos pays. Ce faisant, elle considère le migrant dans l’indivisibilité et l’universalité des droits fondamentaux sans établir de différence – si ce n’est à la marge – sur le caractère « régulier » ou non de son statut. De la même façon et comme son intitulé le précise clairement, elle ne dissocie pas le migrant de son unité familiale, étendant à ses membres la reconnaissance des mêmes droits fondamentaux.
Pourquoi les États membres refusent-ils ce texte ? Sans doute parce qu’il marque la frontière de l’inacceptable et les rappellerait donc à leurs devoirs de garant des droits, y compris pour ceux qui n’en sont pas ressortissants et qui sont bien plus cibles de contrôle ou de répression qu’objets de respect.
L’AEDH appelle expressément les parlementaires européens à renouveler l’invitation adressée par leur Assemblée aux États membres en février 2005 et octobre 2005 pour qu’ils ratifient ladite convention[1] des Nations unies et soutiennent sa ratification universelle. Elle demande au Conseil européen d'appuyer les initiatives contribuant à la reconnaissance des droits universels et indivisibles des migrants. Elle appelle les organisations de la société civile et les citoyens européens à proclamer, encore et encore, leur volonté de voir pleinement reconnus les droits des travailleurs migrants qui vivent à leurs côtés.


Association européenne pour la défense des droits de l’homme (AEDH)
Österreichische Liga Für Menschenrechte (OLFM) – Autriche
Ligue des Droits de L’Homme (LDH) – Belgique
Liga voor Mensenrechten (LVM) – Belgique
European Association For The Defence Of Human Rights – Bulgarie
Czech Helsinki Committee – République Tchèque
Legal Information Centre for Human Rights (LICHR) – Estonie
Ihmisoikeusliitto / Finnish League For Human Rights - Finlande
Ligue des droits de l’homme - France
Internationale Liga Für Menschenrechte (ILMF) – Allemagne
Hellenic League for Human Rights (HLHR) – Grèce
Lega Italiana Dei Diritti Dell’uomo (LIDU) – Italie
Latvian Human Rights Committee (LHRC) – Lettonie
Lithuanian Human Rights Association (LHRA) – Lituanie
Action Luxembourg Ouvert Et Solidaire (ALOS – LDH) – Luxembourg
Black and Ethnic Minorities Infrastructure in Scotland (BEMIS) – Ecosse

Montée de la violence à l’égard des femmes en Égypte



Alors que le tribunal correctionnel de Mansourah en Égypte tient sa première audience pour l’appel introduit dans l’affaire Soheir Mohammed Ibrahim, une jeune fille de treize ans décédée en raison de mutilations sexuelles féminines (MSF), le REMDH examine le cadre législatif, politique et de protection en matière de violence contre les femmes (y compris les MSF) en Égypte. 
Ce rapport révèle que la législation égyptienne en vigueur ne permet pas de lutter contre les viols et les agressions sexuelles fondées sur le genre, dont le nombre a considérablement augmenté depuis la chute du régime de Moubarak en janvier 2011. Les récents amendements apportés au Code pénal concernant le harcèlement sexuel demeurent insuffisants, dans la mesure où le Code ne considère ces actes comme criminels que lorsqu’il est prouvé que l’intention de l’auteur des faits est d’obtenir des faveurs sexuelles. La violence domestique est largement tolérée et aucun effort n’a été consenti par le gouvernement pour combattre ce fléau. Bien que les MSF aient été officiellement qualifiées d’actes criminels en 2008, l’argument de la « nécessité médicale » peut toujours être utilisé pour contourner la loi. En Égypte, entre 90 et 95 % des femmes âgées de 15 à 49 ans ont déjà subi des MSF.
Malgré l’adoption par le Conseil national de la femme d’une stratégie nationale de lutte contre la violence en juin 2014, la société civile n’a pas été consultée et ses recommandations n’ont pas été prises en compte. Pire encore, les auteurs d’actes de violence à l’égard des femmes continuent d’agir en toute impunité, car ces affaires sont bien souvent freinées par la police ou le procureur général. Le gouvernement continue de nier les actes de violence à l’égard des femmes commis par des agents de l’État, malgré les éléments réunis par la société civile.    
En conséquence, le REMDH exhorte le gouvernement égyptien à :
·         Réformer le Code pénal, afin de sanctionner toutes les formes de violence à l’égard des femmes et garantir son application de sorte à garantir l’accès des femmes à la justice ;
·         Adopter une stratégie nationale globale de lutte contre la violence à l’égard des femmes, ainsi qu’une législation assortie de dispositions en matière de mise en oeuvre, d’évaluation et de suivi ;
·         Enquêter sur les actes de violence sexuelle commis contre des femmes depuis novembre 2012 et renvoyer les coupables devant la justice.

Lire le rapport ici.

mardi 16 décembre 2014

Bulletin novembre-décembre 2014

Cliquer ici pour télécharger le bulletin.

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SOMMAIRE de cette édition :




Actualité
2
Les Jours Heureux
5
Les Jours Heureux vus par les jeunes


Vie de la section
6
Bureau 2014-2015 de la section
7
Rapport moral 2014
8
Novembre et décembre marqués par une forte activité militante


Histoire
9
En hommage au caporal Lucien Lechat, et ses camarades de Souain, fusillés pour l’exemple
12
Jaurès et l'Affaire Dreyfus


International
18
Torture, les inquiétantes révélations sur la CIA

samedi 13 décembre 2014

Reconnaissance de la Palestine : écrivez à votre eurodéputé

Après l’Assemblée nationale et le Sénat, c’est au tour de nos députés européens de s’exprimer sur la reconnaissance de l’Etat de Palestine. Parce qu’un vote en ce sens contribuera à une solution politique et à une paix juste au Proche-Orient, écrivez à vos eurodéputés en quelques clics.

1. Cliquez sur l’encadré violet
2. Sélectionnez votre région puis entrez vos coordonnées
3. Cliquez sur l’encadré « envoyer votre message »

Campagne de mail à relayer et soutenir largement, le but étant d’avoir le plus grand nombre de participants avant le 17 décembre. Egalement sur Facebook et Twitter, nous comptons sur vous pour « liker », « partager » et « retwitter » massivement ! 

Torture, les inquiétantes révélations sur la CIA

Communiqué LDH
Paris, le 12 décembre 2014

Depuis 2002, nous savions que les Etats-Unis détenaient illégalement des centaines de suspects à Guantanamo, qui vivaient des conditions abjectes et étaient mal traités. Mais le rapport du Sénat américain révèle l’innommable. La permanence et l’importance de la torture, pratiquée sur les prisonniers pour en obtenir des renseignements, sont décrites et analysées, montrant au passage l’absurdité de ceux qui prétendent qu’elle pourrait être justifiée quand il s’agit de sauver des vies.

La torture est avant tout un acte de barbarie qui porte atteinte à la dignité humaine ; elle est appliquée à des suspects dont on suppose qu’ils seraient susceptibles de détenir des informations. Son interdiction, comme celle de l’esclavage, est proclamée par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et toutes les conventions internationales protégeant les droits de l’Homme. Elle est intangible et indélogeable, quelles que soient les circonstances et la qualité des personnes qui la pratiqueraient, ou de celles qui la subiraient.

C’est un message effrayant qui est ainsi envoyé au monde par la plus ancienne et la plus puissante des démocraties, et particulièrement aux tyrans, aux assassins et aux barbares qui ricanent quand on leur parle « droits de l’Homme ». Quand nous proclamons notre indignation, d’autres ricanent à leur tour. « Il ne faut pas faire d’angélisme sur ce sujet », dit Marine Le Pen, interrogée précisément sur la possibilité d’utiliser la torture pour « faire parler la personne ». Elle répond explicitement que ce peut être « par tous moyens ». Aucune équivoque n’est possible, ce qui n’empêche pas la présidente du Front national d’assumer un mensonge éclatant, osant prétendre que ses propos auraient été interprétés « de façon malveillante ». En fait sa réponse spontanée fait apparaître, de façon claire, que ses convictions sont restées celles de son père, et la « dédiabolisation » n’est qu’une attitude de surface, une hypocrisie, un « hommage que le vice rend à la vertu ».

Voilà qui démontre à nouveau l’évidente et urgente nécessité d’une mobilisation des forces démocratiques, rassemblées pour combattre les dangers de la montée de l’extrême droite. Il faut aussi exiger que la France fasse la clarté sur son passé. Il ne s’agit pas de repentance, mais d’Histoire et de mémoire. Les propos de François Hollande le 20 décembre 2012, à Alger, restent bien faibles face à ce que fut la torture pendant la guerre d’Algérie. Le Sénat américain a conduit une enquête approfondie, Barak Obama et le chef de la CIA ont reconnu et déploré l’existence de cette pratique abominable. Nous ne demandons pas une « repentance », mais une enquête parlementaire et la reconnaissance solennelle par le président de la République, chef des armées, de ce qui s’est passé en Algérie pendant huit ans.

La Loi organique de protection de la sécurité publique : une menace pour les libertés publiques en Espagne



Le Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), l'Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH), déplorent l’adoption hier, 11 décembre, du projet de Loi organique de Protection de la Sécurité Publique en séance plénière du Congrès des Députés. Nos trois organisations dénoncent les restrictions croissantes du droit de manifestation en Espagne.
Cette loi, également appelée « loi bâillon », a été votée le 25 novembre dernier par la Commission des Affaires intérieures du Congrès des Députés, sans modifier le texte de manière substantive afin de protéger les droits des citoyens aux libertés d’expression et de réunion pacifique. En dépit du rejet de tous les partis de l’opposition, des organisations de la société civile dénonçant la menace directe que la loi fait peser sur les droits de réunion pacifique, et de 82 % de l'opinion publique espagnole d’après de récents sondages, cette loi a pourtant été adoptée le lendemain même de la Journée internationale des droits de l’Homme, et entrera en vigueur d’ici la fin de cette année.
Sous le prétexte d’améliorer la sécurité citoyenne, la Loi organique de Protection de la Sécurité Publique établit un arsenal de sanctions administratives parfois très lourdes visant à dissuader les citoyens et citoyennes d’exprimer leurs critiques par des manifestations publiques. Cette loi vise notamment à criminaliser des formes d’action collective et d'expression nouvelles qui se sont développées ces dernières années, y compris les escraches («manifestations de dénonciation publique»), les sit-in, campements sur les places publiques, « encerclements » pacifiques des parlements, et les «concerts de casseroles».
Entre autres, il est particulièrement alarmant que soit passibles d’amendes l’organisation de réunions publiques et de manifestations qui n’ont pas rempli les conditions de déclaration préalable, y compris les rassemblements spontanés pour lesquels la notification s’est avérée impossible. Le caractère pacifique des manifestations n’est nullement pris en compte. Les rassemblements pacifiques dans les environs du Congrès, Sénat ou des assemblées législatives des Communautés autonomes, si elles provoquent de graves perturbations de la sécurité publique, sont considérés comme une « infraction grave » punie par une amende pouvant aller jusqu’à 30.000 euros. L’utilisation « non autorisée » d’images des autorités ou des membres des forces de sécurité est également considérée comme une « infraction grave », ce qui pourrait entraver la documentation d’abus des forces de l’ordre et renforcer l’impunité dont celles-ci bénéficient.
Le REMDH, l’OMCT et la FIDH dénoncent également la légalisation par un amendement présenté à la dernière minute par le gouvernement des « expulsions à chaud », pratique à Ceuta et Melilla qui consiste à renvoyer immédiatement vers le Maroc les migrants qui ont réussi à franchir la frontière et nos organisations considèrent que cette nouvelle disposition législative  viole le droit d’asile et le principe de non-refoulement.  De plus, cet amendement crée des sévères risques de torture et mauvais traitements à l’encontre des migrants car ils seraient alors privés de la possibilité de présenter une demande en cas d’abus des forces de l’ordre.
La Loi organique de Protection de la Sécurité Publique est contraire aux engagements internationaux de l’Etat espagnol, notamment la Convention relative au statut des réfugiés de 1951, l’articles 12.1, 18 et 19 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE et de l’article 4 du Protocole n°4 et l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’Homme, et aux recommandations de la Cour Européenne des droits de l’Homme et autres instances internationales des droits de l’Homme. Le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, M. Nils Muiznieks, a également souligné la menace que présente la loi sur l’exercice du droit de réunion pacifique et a appelé à ce que les aspects relatifs à la demande d’autorisation préalable, la considération des manifestations autour du Congrès ou des assemblées régionales comme une faute grave et l'interdiction d'enregistrer des images des forces de sécurité dans l'exercice de leurs fonctions soient retirés de la version finale. Il a également rappelé lors de la Journée internationale des droits de l’Homme le 10 décembre, que la proposition de légaliser les expulsions automatiques et collectives de migrants est « injuste et illégale » en vertu du droit international.
Le REMDH, l’OMCT et la FIDH appellent donc les autorités espagnoles à modifier la loi sans délai afin que celle-ci soit conforme avec les normes internationales relatives aux droits de réunion et au droit d’asile, et attendent de l’Union européenne, y compris du Parlement européen et des autres États membres, une réaction ferme face à cette violation des libertés publiques en Espagne.