mardi 31 octobre 2017

Fausse sortie de l’état d’urgence, vrai recul de l’Etat de droit

Ce 1er novembre, l’état d'urgence, faux-nez de l’état de siège, instauré après les dramatiques attentats de novembre 2015, ne sera pas reconduit. Bien qu’ayant vocation à s’appliquer pour une période limitée, « en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public », il aura été prolongé six fois par les gouvernements successifs, pour une durée totale inédite de près de vingt-quatre mois. Ce régime d’exception, créé en 1955 pendant la guerre d’Algérie, dénature fondamentalement le fonctionnement de notre démocratie par la confusion des pouvoirs qu’il entraîne. Durant cette période, des pouvoirs exceptionnels sont en effet transférés au ministre de l’Intérieur, aux préfets et à la police, contournant ainsi l’autorité judiciaire, sous prétexte de lutte contre le terrorisme.

La Ligue des droits de l'Homme déplore qu’aucun bilan précis n’en ait été dressé. La fonction d’affichage d'une réaction symbolique des pouvoirs publics face à l’horreur terroriste a donc primé sur les résultats. Des rapports parlementaires d’évaluation partielle, comme ceux d’associations de défense des droits, ont pourtant démontré que son efficacité réelle était très discutable et que des abus et dérives graves d’atteintes aux droits fondamentaux avaient été commis (détournement contre les mouvements sociaux ou écologistes, assignations à résidence et perquisitions abusives…). De plus, les poursuites et les procédures abouties en matière antiterroriste avec des mesures du droit commun montrent que, sans mesures dérogatoires, on peut répondre au terrorisme par un travail efficace entre police, renseignement et justice. La LDH regrette que le gouvernement n’en ait pas été tenu compte pour agir avec courage, réalisme et détermination, dans le cadre de l’Etat de droit.

mercredi 25 octobre 2017

France : Vers une politique assumée de criminalisation des défenseurs des droits des migrants ?

’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (un partenariat FIDH-OMCT) et la Ligue française des droits de l’Homme (LDH) condamnent fermement la multiplication des cas de harcèlement à l’encontre des personnes solidaires et défenseurs des droits des migrants et réfugiés.
Le 2 octobre 2017, le Tribunal de grande instance de Nice a une nouvelle fois condamné un individu pour avoir « aidé l’entrée, la circulation et le séjour irrégulier d’un étranger en France » aux termes de l’article L.622-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). M. Raphaël Faye Prio, étudiant de 19 ans, a été condamné à trois mois de prison avec sursis pour avoir transporté quatre personnes en situation irrégulière depuis la gare de Saorge au domicile de M. Cédric Herrou, alors que ceux-ci n’avaient pas de toit où passer la nuit.
« L’assistance portée par Cédric Herrou, Pierre-Alain Mannoni, Raphaël Faye Prio et toutes les autres personnes condamnées relevait de la responsabilité des autorités françaises et ne devrait pas être incriminée par celles-ci. Ces personnes ont agi là où les autorités ne le font pas, pour garantir la dignité de personnes migrantes et réfugiées » ont déclaré nos organisations.
Dans une note conjointe publiée aujourd’hui, l’Observatoire et la LDH dénoncent la multiplication des cas de harcèlement et appellent les autorités à garantir une protection efficace contre les poursuites visant des actions « humanitaires et désintéressées » en amendant les dispositions imprécises de l’article L.622-4 du Cedesa ayant donné lieu à des interprétations permettant la poursuite pénale de personnes pour avoir mené des actions « humanitaires et désintéressées ».[1]