jeudi 24 décembre 2015

Sortir de l'état d'urgence (Communiqué)


Sortir de l’état d’urgence
En réaction à l’horreur des attentats, l’état d’urgence a été décrété par le gouvernement, puis aggravé et prolongé pour une durée de trois mois. Nos organisations ont immédiatement exprimé leurs craintes vis-à-vis de ce régime d’exception ;  ces craintes sont aujourd’hui confirmées par l’ampleur des atteintes aux libertés constatées depuis quelques semaines. Nous assistons à un véritable détournement de l’état d’urgence qui cible également des personnes sans aucun lien avec des risques d’attentat. Ces abus doivent cesser.
La volonté de se rassembler et de manifester ensemble a prévalu après les attentats commis à Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes, en janvier 2015. Elle prévaut encore. Or, depuis le 13 novembre 2015, les interdictions visant les mobilisations sur la voie publique se multiplient. Manifester n’est plus un droit, et les rares concessions accordées par les préfectures, qui attendent souvent le dernier moment pour informer de leurs intentions, entravent dans les faits son exercice. 
Le ministère de l’Intérieur justifie tout cela par son incapacité à sécuriser les parcours alors même qu’il autorise, dans le même temps, les rencontres sportives et des événements tels que les marchés de Noël, qui se tiennent sur la voie publique. L’interdiction des rassemblements et manifestations entraîne la multiplication des arrestations, des gardes à vue, des assignations à résidence, un fichage policier des militants, et, pour quelques-uns,  des condamnations. Qui peut croire que cela soulage les autorités ?  La censure, ici, s’avère doublement contreproductive…
L’état d’urgence autorise par ailleurs des perquisitions sur ordre des préfectures, de jour comme de nuit, en dehors de tout cadre judiciaire, sur le fondement de fiches possiblement erronées, de dénonciations, d’informations et de soupçons sujets à caution. Plus de deux mille six cents intrusions discrétionnaires sont intervenues à domicile, dans des mosquées, des commerces, interventions souvent violentes, sans qu’aucune mise en examen pour terrorisme n’ait eu lieu. Rien n’indique qu’une telle frénésie va s’arrêter, chacun peut en être victime.
Les assignations à résidence se multiplient sur la base de motifs aussi vagues que la présence sur le lieu d’une manifestation ou le fait de « connaître » tel ou tel individu. Ces graves restrictions sont appliquées, sans distinction, et de manière massive, d’autant que les juridictions administratives ont montré qu’elles s’en accommodent, quitte à ce que les libertés en souffrent. Elles reprennent à leur compte toutes les allégations du ministère de l’Intérieur et, comble de la démission, sont nombreuses à considérer qu’il n’y aurait pas d’urgence à statuer sur l’état d’urgence.
L’état d’urgence et le climat de guerre intérieure alimenté par le gouvernement contribuent au renforcement des amalgames et aux pratiques discriminantes, notamment de la part des forces de police. Ce ne sont pas «  les terroristes qui sont terrorisés », ce sont des jeunes et des populations victimes de l’arbitraire en raison de leur origine et/ou de leur religion qui voient leur situation encore davantage fragilisée.
Reprenant à son compte les exigences de l’extrême droite, FN en tête, le gouvernement s’engage honteusement dans une modification de la Constitution visant à étendre la déchéance de la nationalité aux binationaux nés en France.  
Ces multiples atteintes portées au contrat démocratique sont une mauvaise réponse aux actes terroristes. Notre pays a été blessé, mais loin d’en apaiser les plaies, l’état d’urgence risque de les exacerber en appauvrissant notre démocratie, en délégitimant notre liberté. 
Dans ces circonstances, nous appelons les pouvoirs publics à :
- jouer leur rôle de garants de la défense des droits et des libertés publiques ;
- rétablir, sans délai, le droit plein et entier de manifester ;
- cesser les perquisitions et les assignations à résidence arbitraires et à agir dans le cadre de procédures judiciaires ;
- mettre en place des garanties effectives de contrôle ;
-  lever l’état d’urgence ;
- renoncer à une réforme constitutionnelle préparée dans l’urgence et au contenu inacceptable.

Signataires :
AFD International, Agir pour le changement démocratique en Algérie (Acda), Altertour, L'Appel des appels, Assemblée citoyenne des originaires de Turquie (Acort), Association démocratique des Tunisiens en France (ADTF), Association française des juristes démocrates (AFJD), Association France Palestine solidarité (AFPS), Association Grèce France Résistance, Association interculturelle de production, de documentation et de diffusion audiovisuelles (AIDDA), Association des Marocains en France (AMF), Association pour la reconnaissance des droits et libertés aux femmes musulmanes (ARDLFM), Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF), Association des Tunisiens en France (ATF), Association des universitaires pour le respect du droit international en Palestine (Aurdip),  Attac, Cadac, Cedetim, Centre islamique Philippe Grenier (CIPG), Centre de recherche et d'information pour le développement (Crid), CGT-Police Paris, Collectif 3C, Collectif des 39, Collectif CGT Insertion-Probation (UGFF-CGT), Collectif Judéo Arabe et Citoyen pour la Palestine (CJACP), Collectif Stop le contrôle au faciès, Confédération générale du travail (CGT), Confédération nationale du logement (CNL), Confédération paysanne, Conseil national des associations familiales laïques (Cnafal), Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), Collectif des féministes pour l’égalité (CFPE),  Collectif Memorial 98, Collectif des musulmans de France (CMF), Collectif national pour les droits des femmes (CNDF), Comité pour le développement et le patrimoine (CDP), Comité pour le respect des libertés et des droits de l'Homme en Tunisie (CRLDHT), Commission islam et laïcité, Confédération syndicale des familles (CSF), Coordination de l’action non-violente de l’Arche (Canva), Coordination des collectifs AC !, Droits devant !, Droit au logement (Dal), Droit solidarité, Emmaüs France, Emmaüs International, Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH), Fédération nationale de la Libre pensée, Fédération des Tunisiens citoyens des deux rives (FTCR), Femmes Solidaires, Filles et fils de la République (FFR), Fondation Copernic, Fondation Danielle Mitterrand France Libertés,  Genepi, Ipam, La Cimade, La Ligue de l'enseignement, La Quadrature du Net, Le Gisti, Le Mouvement de la paix, Les Amoureux au ban public, Les Céméa, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Maison des potes, Mamans toutes égales (MTE), Minga-agir ensemble pour une économie équitable, Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap), Observatoire international des prisons (OIP) - section française, Organisation de femmes égalité, Osez le féminisme !, Planning familial, Réseau d'alerte et d'intervention pour les droits de l'Homme (RaidH), Réseau éducation sans frontières (RESF), Réseau euromaghrébin culture et citoyenneté (REMCC), Réseau Euromed France (REF), Réseau Immigration Développement Démocratie (IDD), SNPES-PJJ/FSU, Solidaires étudiant-e-s, Solidarité laïque, Sud Intérieur, Syndicat des avocats de France (Saf), Syndicat français des artistes interprètes (SFA), Syndicat de la magistrature, Syndicat de la médecine générale, Syndicat national des arts vivants (Synavi), Syndicat national des journalistes (SNJ), Syndicat national unitaire interministériel des territoires, de l'agriculture et de la mer (SNUITAM – FSU), SNJ-CGT, Unef, Union générale des fédérations de fonctionnaires CGT (UGFF-CGT), Union juive française pour la paix (UJFP), Union nationale lycéenne (UNL), Union syndicale de la psychiatrie (USP), Union syndicale Solidaires, Union des travailleurs immigrés tunisiens (Utit).
Associations locales et autres :
Asti 93, Collectif 07 stop au gaz et huile de schiste, Collectif BDS Saint-Etienne, Collectif Justice & Libertés (Strasbourg), Collectif Maquis de Corrèze, Collectif Romeurope 94, la revue Ecole émancipée, Espace franco-algérien, Faucheurs volontaires de la Loire, le journal Regards, Réseaux citoyens Saint-Etienne, Vigilance OGM 18.

jeudi 17 décembre 2015

Retour sur l'Université d'automne de la Ligue des droits de l'Homme 2015

Les 28 et 29 novembre, s'est tenu l'Université d'automne da Ligue des Droits de l'Homme autour du thème "Penser l'antiracisme: pour une contre-offensive ?". Retrouvez ici les vidéos des différentes interventions auquel on pu assister les ligueurs et ligueuses http://www.ldh-france.org/les-videos-luniversite-dautomne-2015-penser-lantiracisme-contre-offensive/







mercredi 16 décembre 2015

Tentative d'incendie contre la mosquée de Loudéac : halte aux amalgames !

Après la tentative d'incendie contre la mosquée de Loudéac (Côtes d'Armor), la Ligue des Droits de l'Homme de Rennes se joint à la la section de Loudéac afin d'affirmer son soutien à toute la communauté musulmane. Cette acte d'origine volontaire a eu lieu dans la nuit du 28 au 29 novembre 2015 et nous encourage à toujours plus lutter et mettre en garde contre les amalgames.

mardi 1 décembre 2015

[Conférence LDH Rennes] " Traités transatlantiques : une offensive contre la démocratie et les droits ? "

Mardi 19 Janvier 2016 à 20 heures à la M.I.R. (Maison Internationale de Rennes), la Section de Rennes de la Ligue des Droits de l’Homme organise une Conférence-Débat avec Dominique Guibert, Président de l'Association Européenne pour la Défense des droits de l'Homme (AEDH), sur le thème : « Traités transatlantiques : une offensive contre la démocratie et les droits ». Ce sujet est d’une grande actualité au moment où les négociations sur les traités « de partenariat économique » entre l’Europe et les États-Unis et le Canada  (CETA, TTTIP ou TAFTA) touchent à leur fin. La mobilisation des citoyens pour infléchir ces textes qui portent atteinte aux droits fondamentaux est urgente. 

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Le TTIP et ses effets sur les droits fondamentaux.

Par Jean Dudouyt

Un accord qui va bouleverser nos vies… et nos droits

Le TTIP (partenariat transatlantique de commerce et d'investissement) connu sous le nom de traité de libre-échange transatlantique (« TAFTA » en anglais), est un accord commercial en cours de négociation entre l'Union européenne et les États-Unis prévoyant la création en 2015 d'une zone de libre-échange transatlantique souvent appelée grand
marché transatlantique. Si le projet aboutit, il instituera la zone de libre-échange la plus importante de l'histoire, couvrant 45,5 % du PIB mondial.

Ses défenseurs affirment que l'accord conduira à une croissance économique pour les deux parties tandis que les critiques soutiennent notamment qu'il augmentera le pouvoir des entreprises face aux États et compliquera la régulation des marchés.

L’enjeu principal du TTIP, c’est le renforcement des marges de manœuvre des entreprises et la poursuite d’une globalisation néolibérale. Ce renforcement est inscrit dans le titre du traité. Le terme le plus important dans « Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement » c’est « investissement ». Il signifie que les États vont :
ouvrir leur territoire aux entreprises (et pas seulement aux marchandises importées) ;
ouvrir des secteurs jusqu’alors protégés – entreprises publiques, services publics, secteur non marchand, sécurité sociale - aux capitaux privés ;
accroître les moyens d’influence des entreprises sur le processus législatif ;
créer un tribunal privé devant lequel les entreprises pourront attaquer les lois des États et demander des dizaines de millions de dollars de compensations financières, aux frais du contribuable.

Le TTIP, en supprimant les droits de douane permettrait l'entrée des marchandises américaines en masse. Actuellement certains secteurs sont protégés par de forts droits de douane et les américains ont été obligés de créer des usines en Europe (exemple de Ford) : produits agricoles, camions, chaussures, produits audio-visuels, vêtements…
Avec le TTIP, ce ne serait plus une obligation et des emplois dans de nombreux secteurs repartiraient aux USA où le « coût du travail » est plus faible, voire en sous-traitance en Amérique Latine.

Pas seulement un accord de libre échange… et une gouvernance sur mesure

Le TTIP n'est pas seulement un accord de libre-échange visant à l'abaissement des barrières douanières. Les autres objectifs affirmés sont :
La diminution des réglementations (en particulier les normes concernant la santé et l'alimentaire) ;
La commercialisation des services ;
Les marchés publics ;
Les droits de propriété intellectuelle ;
La régulation financière.

Et pour gérer ce dossier dans l'avenir, l'accord prévoit la création d'une structure de gouvernance qui sera chargé de mettre en place les normes et les règlements (Conseil Transatlantique de coopération réglementaire ou RCC) composée de fonctionnaires des agences de régulation américaines et de la Commission Européenne… sans contrôle
démocratique.

Il est aussi prévu une structure d'arbitrage (Système de règlement des différends ou RDIE) pour offrir aux investisseurs privés le « plus haut niveau possible » de protection légale contre les États. C'est le monde à l'envers. Les arbitres ne seront pas des juges indépendants mais des avocats d'affaires choisis par chaque partie. La multinationale pourra donc demander une compensation à un État qui aura empêché tel investissement ou qui aura remis en cause tel service et qui sera en infraction avec TTIP (« expropriation
indirecte »)!

En fait le TTIP c'est :
Une opposition frontale du social et de l'économie ;
Une opposition totale du principe de précaution et du profit.

La mobilisation démocratique pour forcer le secret et défendre les droits fondamentaux

Double paradoxe : on vante la société de l'information alors que les discussions sur le TTIP sont du domaine du secret réservé de la Commission et des gouvernements. On prône le dialogue civil et le dialogue social alors que dans ce dossier on considère que l'économie est prioritaire sur tous les autres domaines. Il n'y a pas de débat démocratique.

L'accord TTIP a été discuté dans le plus grand secret depuis quelques années entre la Commission Européenne et le Gouvernement Américain et les inquiétudes des parties prenantes n'étaient pas prises en compte par les négociateurs (secret des négociations,
mandat des négociateurs inconnu).

Mais le secret commence à être levé sous la pression des initiatives citoyennes, associatives et syndicales qui se développent en Europe et de certains parlementaires européens qui « montent au créneau » sur ce dossier qui bouleversera nos vies. Aujourd'hui les choses ont évolué et l'information diffuse progressivement (voir le site de la
Commission). C'est une victoire – partielle – des organisations luttant pour le respect de la
démocratie.

L'accord devra être ratifié par le Parlement de l'Union Européenne (et peut-être par
les parlements nationaux). Les citoyens et les organisations non-gouvernementales doivent se mobiliser dès maintenant pour infléchir le dossier. La LDH est concernée au premier chef puisque cet accord constitue potentiellement une atteinte aux droits
fondamentaux : économiques, sociaux, culturels et environnementaux (les DESCE).

Dans cette ambiance de secret, la presse a très peu informé sur ce dossier à ce jour alors que ce TTIP va profondément impacter nos vies. Il est temps d'informer et de débattre sur ce dossier très avancé. (...)