mardi 1 décembre 2015

[Conférence LDH Rennes] " Traités transatlantiques : une offensive contre la démocratie et les droits ? "

Mardi 19 Janvier 2016 à 20 heures à la M.I.R. (Maison Internationale de Rennes), la Section de Rennes de la Ligue des Droits de l’Homme organise une Conférence-Débat avec Dominique Guibert, Président de l'Association Européenne pour la Défense des droits de l'Homme (AEDH), sur le thème : « Traités transatlantiques : une offensive contre la démocratie et les droits ». Ce sujet est d’une grande actualité au moment où les négociations sur les traités « de partenariat économique » entre l’Europe et les États-Unis et le Canada  (CETA, TTTIP ou TAFTA) touchent à leur fin. La mobilisation des citoyens pour infléchir ces textes qui portent atteinte aux droits fondamentaux est urgente. 

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Le TTIP et ses effets sur les droits fondamentaux.

Par Jean Dudouyt

Un accord qui va bouleverser nos vies… et nos droits

Le TTIP (partenariat transatlantique de commerce et d'investissement) connu sous le nom de traité de libre-échange transatlantique (« TAFTA » en anglais), est un accord commercial en cours de négociation entre l'Union européenne et les États-Unis prévoyant la création en 2015 d'une zone de libre-échange transatlantique souvent appelée grand
marché transatlantique. Si le projet aboutit, il instituera la zone de libre-échange la plus importante de l'histoire, couvrant 45,5 % du PIB mondial.

Ses défenseurs affirment que l'accord conduira à une croissance économique pour les deux parties tandis que les critiques soutiennent notamment qu'il augmentera le pouvoir des entreprises face aux États et compliquera la régulation des marchés.

L’enjeu principal du TTIP, c’est le renforcement des marges de manœuvre des entreprises et la poursuite d’une globalisation néolibérale. Ce renforcement est inscrit dans le titre du traité. Le terme le plus important dans « Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement » c’est « investissement ». Il signifie que les États vont :
ouvrir leur territoire aux entreprises (et pas seulement aux marchandises importées) ;
ouvrir des secteurs jusqu’alors protégés – entreprises publiques, services publics, secteur non marchand, sécurité sociale - aux capitaux privés ;
accroître les moyens d’influence des entreprises sur le processus législatif ;
créer un tribunal privé devant lequel les entreprises pourront attaquer les lois des États et demander des dizaines de millions de dollars de compensations financières, aux frais du contribuable.

Le TTIP, en supprimant les droits de douane permettrait l'entrée des marchandises américaines en masse. Actuellement certains secteurs sont protégés par de forts droits de douane et les américains ont été obligés de créer des usines en Europe (exemple de Ford) : produits agricoles, camions, chaussures, produits audio-visuels, vêtements…
Avec le TTIP, ce ne serait plus une obligation et des emplois dans de nombreux secteurs repartiraient aux USA où le « coût du travail » est plus faible, voire en sous-traitance en Amérique Latine.

Pas seulement un accord de libre échange… et une gouvernance sur mesure

Le TTIP n'est pas seulement un accord de libre-échange visant à l'abaissement des barrières douanières. Les autres objectifs affirmés sont :
La diminution des réglementations (en particulier les normes concernant la santé et l'alimentaire) ;
La commercialisation des services ;
Les marchés publics ;
Les droits de propriété intellectuelle ;
La régulation financière.

Et pour gérer ce dossier dans l'avenir, l'accord prévoit la création d'une structure de gouvernance qui sera chargé de mettre en place les normes et les règlements (Conseil Transatlantique de coopération réglementaire ou RCC) composée de fonctionnaires des agences de régulation américaines et de la Commission Européenne… sans contrôle
démocratique.

Il est aussi prévu une structure d'arbitrage (Système de règlement des différends ou RDIE) pour offrir aux investisseurs privés le « plus haut niveau possible » de protection légale contre les États. C'est le monde à l'envers. Les arbitres ne seront pas des juges indépendants mais des avocats d'affaires choisis par chaque partie. La multinationale pourra donc demander une compensation à un État qui aura empêché tel investissement ou qui aura remis en cause tel service et qui sera en infraction avec TTIP (« expropriation
indirecte »)!

En fait le TTIP c'est :
Une opposition frontale du social et de l'économie ;
Une opposition totale du principe de précaution et du profit.

La mobilisation démocratique pour forcer le secret et défendre les droits fondamentaux

Double paradoxe : on vante la société de l'information alors que les discussions sur le TTIP sont du domaine du secret réservé de la Commission et des gouvernements. On prône le dialogue civil et le dialogue social alors que dans ce dossier on considère que l'économie est prioritaire sur tous les autres domaines. Il n'y a pas de débat démocratique.

L'accord TTIP a été discuté dans le plus grand secret depuis quelques années entre la Commission Européenne et le Gouvernement Américain et les inquiétudes des parties prenantes n'étaient pas prises en compte par les négociateurs (secret des négociations,
mandat des négociateurs inconnu).

Mais le secret commence à être levé sous la pression des initiatives citoyennes, associatives et syndicales qui se développent en Europe et de certains parlementaires européens qui « montent au créneau » sur ce dossier qui bouleversera nos vies. Aujourd'hui les choses ont évolué et l'information diffuse progressivement (voir le site de la
Commission). C'est une victoire – partielle – des organisations luttant pour le respect de la
démocratie.

L'accord devra être ratifié par le Parlement de l'Union Européenne (et peut-être par
les parlements nationaux). Les citoyens et les organisations non-gouvernementales doivent se mobiliser dès maintenant pour infléchir le dossier. La LDH est concernée au premier chef puisque cet accord constitue potentiellement une atteinte aux droits
fondamentaux : économiques, sociaux, culturels et environnementaux (les DESCE).

Dans cette ambiance de secret, la presse a très peu informé sur ce dossier à ce jour alors que ce TTIP va profondément impacter nos vies. Il est temps d'informer et de débattre sur ce dossier très avancé. (...)